mardi 11 septembre 2007

Le 11 septembre... le Chili...


Que s'est-il passé au Chili en septembre 1973? Le pays est alors une démocratie stable et solide où les militaires sont subordonnés au pouvoir civil. Isolé à l'extrémité du continent entre la barrière des Andes et le Pacifique, il ne revêt pour les États-Unis, malgré sa richesse minière, qu'une importance géopolitique mineure. Un seul point inquiète le Département d'État: l'existence du plus grand parti communiste des Amériques et la possibilité pour une coalition comprenant celui-ci de gagner les élections. En 1970, l'Unité populaire l'emporte - avec seulement 36% des voix. Salvador Allende est élu président. Il va engager le pays dans la "voie chilienne au socialisme", contre plus de 60% des électeurs.

La CIA n'est pas inquiète: Allende n'est-il pas un socialiste légaliste? Mais le président Nixon, sensible aux plaintes des grandes entreprises américaines manacées de nationalisation, va réagir brutalement. Pour Henry Kissinger, il faut empêcher "par tous les moyens" Allende d'assumer le pouvoir. En effet, selon la doctrine états-unnienne, le communisme ne peut s'implanter dans le monde libre que par la force des armes. Instaurer le socialisme par les urnes constitue donc une défaite grave et, qui plus est, un mauvais exemple pour l'Europe.

En 1971, Washigton programme "le chaos économique au Chili". La CIA finance les grèves de transporteurs et de commerçants qui paralysent le pays en 1972 et 1973. Un "blocus invisible", qui consiste à couper les crédit internationaux et à limiter les ventes de produits sensibles, est mis en place. De multiples tentatives putschistes disposant d'un appui plus ou moins voyant de spécialistes américains de cover actions ("actions secrètes") et de dirty tricks ("coups tordus") impliquant la CIA et l'entreprise ITT échouent, tout en préparant le terrain pour le 11 septembre 1973.

Sans l'isolement politique de l'Unité populaire et la surenchère irresponsable de l'extrême gauche, les coups de boutoir américains n'auraient pas suffi a faire basculer l'armée du côté des forces factieuses. Quoi qu'il en soit, l'ingérence nord-américaine au Chili a permis l'instauration d'une des dictatures les plus brutales du continent, celle de Pinochet.


ROUQUIÉ Alain, "Que s'est-il passé au Chili?", l'Histoire, no.322, juillet-août 2007, p.100

2 commentaires:

Le professeur masqué a dit…

J'aime bien que vous n'oubliez pas cette date importante pour bien des Québécois d'origine chilienne et pour ceux qui ont de la mémoire.

Le professeur masqué a dit…

J'aime bien que vous n'oubliez pas cette date importante pour bien des Québécois d'origine chilienne et pour ceux qui ont de la mémoire.